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Des enseignant·es qui souffrent et des élèves que l’on maltraite : la vie en UPE2A

L’intersyndicale CGT Educ’Action, Sud Education, FSU et le RESF (réseau éducation sans frontière) ont été reçus en audience le 07 mai 2024 au Rectorat au sujet des conditions de scolarisation des élèves allophones et les conditions de travail des collègues enseignant en UPE2A : « unité pédagogique pour élèves allophones arrivants ».

Nous avons procédé à un appel à témoignages dans l’urgence et ce qui est frappant, c’est le nombre significatif de réponses arrivées très vite et la demande quasi unanime d’anonymat.

Nous avons été alerté·es par les enseignant·es d’UPE2A et les associations venant en aide aux jeunes mineur·es isolé·es de la situation de plus en plus dégradée de la scolarisation des jeunes allophones nouvellement arrivé·es dans notre académie, ainsi que de la multiplication des situations de refus de scolarisation. Les enseignant·es dénoncent également des conditions de travail toujours plus difficile et la souffrance au travail qui en découle.

Des élèves rejeté·es ou maltraité·es

Tout d’abord un nombre important d’élèves reconnu·es mineur·es ne sont pas scolarisé·es dans l’académie de Normandie alors que le droit à la scolarisation concerne tou·tes les mineur·es.

En raison du manque de places notamment à Caen, au Havre ou à Evreux, on constate des délais de scolarisation qui se rallongent (jusqu’à 4 mois), des classes que l’on surcharge, certaines pouvant atteindre 25 élèves allophones, ne parlant pas la même langue.

Par ailleurs, dans certains lycées des collègues reçoivent des notifications d’inscription mais les enfants n’arrivent qu’au bout de plusieurs semaines voire plusieurs mois en raison de problèmes de coordination avec les services sociaux.

D’autre part, le manque de places en UPE2A NSA (Non Scolarisé Antérieurement) fait que de plus en plus de ces élèves non scolarisé·es dans leur pays d’origine se retrouvent en UPE2A ordinaire, entraînant un gros problème de fonctionnement et de conditions d’accueil.

Dans le primaire, on refuse systématiquement l’intégration en UPE2A des élèves qui sont dans des classes de CP dédoublées. Encore une fois, ceci est dû à un manque de places même si au Rectorat, la réponse est de dire qu’un enfant allophone en CP apprend plus vite le français en étant dans sa classe qu’en étant en UPE2A.

Des enseignant·es en souffrance

Nos collègues font face à une multiplication des tâches (mise en place des emplois du temps, coordination, accompagnement…) et à des conditions de travail qui se dégradent au point que beaucoup n’ont plus la possibilité de bien faire leur travail.

Dans le primaire, la multiplication des lieux d’intervention entraîne un saupoudrage de l’enseignement et l’épuisement des enseignant·es.

Les structures sont trop chargées, ce qui rend impossible d’accueillir décemment les nouveaux élèves.

Nos collègues sont isolé·es, sans pouvoir contacter facilement les collègues qui ont les élèves en classe « ordinaire », l’administration de l’établissement de rattachement ne facilite pas toujours les échanges et le suivi en devient plus compliqué.

Le Rectorat et le CASNAV (Centre académique pour la scolarisation des élèves allophones nouvellement arrivés) exigent de nos collègues qu’iels passent la certification alors que ces mêmes collègues sont déjà en poste depuis des années.

Le management agressif du CASNAV et de l’inspection est flagrant : stress avant, pendant et après les visites et commissions, multiplication des arrêts de travail pour burn-out et décisions douloureuses de la part des collègues d’arrêter leurs missions dans les UPE2A.

Enseigner en UPE2A, une vocation vouée à disparaitre ? Nous refusons ce constat !

Nous demandons :

– des moyens pour les UPE2A et la création de places et de structures (UPE2A et UPE2A NSA) à la hauteur des besoins, de la maternelle au lycée ;

– l’assurance que les effectifs ne dépasseront pas 15 élèves par UPE2A ;

– la fin des refus de scolarisation d’enfants allophones par manque de place ;

– la fin des pressions exercées sur nos collègues « pour faire de la place au plus vite » ;

– la fin des pressions sur des collègues qui souhaitent écrire un témoignage sur un·e élève pour constituer les dossiers de demandes d’asile ou de régularisation ;

– la non généralisation de l’itinérance en primaire ;

– une formation à hauteur des besoins.

Si vous ne l’avez pas déjà fait, n’hésitez pas à nous faire parvenir d’autres témoignages.